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notice

Le 5 septembre 1755, le commandant anglais Winslow notifia aux paysans acadiens, rassemblés dans l’église de Grand-Pré, la terrible sentence royale, et on procéda de même dans tous les villages d’Acadie. Le 10 du même mois, l’embarquement des exilés eut lieu ; Grand-Pré seul en fournit 1 923.

Des scènes déchirantes se déroulèrent alors : des familles furent brutalement divisées, et leurs membres, jetés sur des rivages différents, se trouvèrent ainsi séparés pour toujours ; on tira sur les malheureux qui s’évadaient, et ceux qui réussirent à s’échapper rencontrèrent chez les Indiens sauvages la pitié et l’hospitalité que leur refusait une nation civilisée. Sept mille enfants de la France furent ainsi jetés, comme de vils troupeaux, sur des côtes éloignées, sans autres ressources que le peu de hardes et de provisions qu’ils avaient pu emporter. Mais la haine des persécuteurs n’était pas satisfaite ; elle s’assouvit sur les biens des proscrits. Les Anglais brûlèrent dans le seul district des Mines, 400 maisons, 500 étables ; ils enlevèrent 2,000 bœufs, 3,000 vaches, 5,000 veaux, 600 chevaux, 12,000 moutons et 500 porcs. « On se demande, dit Ney, en lisant ces détails, si c’est bien un peuple civilisé qui a pu ainsi arracher une population tout entière