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TERRE D’ÉBÈNE

l’animal se jette dans le marigot et vous rejoint à toute nage ! Je lui tends un caillou blanc, en guise de sucre, espérant ainsi le dégoûter de moi pour toujours. Il n’est pas vexé. Seulement il est mouillé !

Plus que trois kilomètres. Pourvu que ma peau sur laquelle je suis assis tienne jusqu’au bout ? Une pyramide de pierre. Que fait-elle là ? On se sent si loin du monde que tout ce qui le rappelle vous émeut. Le lieutenant de vaisseau Boiteux est tombé à cet endroit. C’est le dernier point ombragé. On voit déjà les sables.

Et voici l’arbre aux chiffons. Un musulman revenant de la Mecque s’est arrêté ici. Il y est mort. L’arbre est devenu fétiche. Tous ceux qui passent déchirent un morceau de leur boubou et le nouent à une branche. Ils auront un boubou neuf dans l’année et de la chance pour le reste du chemin. Laissons-y la moitié de notre mouchoir. Sait-on ?

Soudain plus d’arbres ! Devant vous un grand fleuve de sable. Le Sahel ! La fin du Sahara ! On se hausse sur les étriers. Pas encore !

Le cheval enfonce. Les sabots ne font plus de bruit. Le silence qui cependant était partout, semble, cette fois, dire qu’il est là.

Tout est blanc autour de vous. Le désert ondule. Un léger vent fait moutonner les petites crêtes. Un chameau navigue à l’horizon. Terre ! Terre !… Tombouctou !