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TERRE D’ÉBÈNE

vers elle ; devant moi, un homme, harassé, y monte aussi. Je le rattrape, le regarde. On croirait que deux blancs se rencontrant dans le Mayombe vont s’embrasser ? Il ne me dit rien.

— Je vais à la case, dis-je.

Il répond :

C’est ma case, vous pourrez y mettre votre lit.

Il entre. J’entre. Il appelle :

— Boy ! Boy ! Ma soupe !

Le boy lui présente une casserole. Il s’assied sur la marche et mange.

— Voulez-vous des conserves ? lui dis-je.

— J’ai deux biches qui pourrissent, répond-il, elles ne me tentent pas.

— Alors, du vin ?

— Non !

— Vous êtes malade ?

— Je suis malade, les nègres sont malades, le chemin de fer est malade, le bon Dieu, s’il venait sur les chantiers, serait malade !

Il finit sa soupe, se leva et, passant devant moi, me dit d’un ton furieux :

— Oui, on est malade !

Il disparut, et j’entendis son corps tomber sur son lit Picot, comme un plomb[1].

Au matin, je repartis. Il me faudra trois jours

  1. L’auteur, depuis, a appris la mort de cet homme.