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TERRE D’ÉBÈNE

rosité, leur piété filiale. Ouanilo n’avait, lui, ni troupeaux ni trésors de famille. Son peuple ne lui faisait plus de dons. Son peuple ? Il regardait l’ancien petit prince sans vouloir se souvenir. Ouanilo n’était plus de chez lui. Il s’en alla à Boïcon, chez les marchands blancs. Les marchands blancs ne donnent pas beaucoup de marchandises pour peu d’argent. Ouanilo revint avec quelques pièces de calicot. Il avait une bague, il la joindrait à ses pauvres pagnes pour prouver sa bonne volonté.

Le grand jour arriva.

C’était dans la cour du grand tata d’Aouagbé, son frère aîné. Les autorités blanches, du gouverneur à l’évêque, étaient là. Les soixante-dix femmes d’Aouagbé, groupées, chantaient le chant funèbre. Ouanilo, hésitant, s’éloigna des cris sauvages et conduisit sa femme blanche, immensément troublée par la furie de ses belles-sœurs, entre l’évêque et le gouverneur. Chacun de ses frères se tenait, selon la coutume, au milieu de ses femmes et de ses serviteurs. Ouanilo chercha où se placer.

Un mouvement de surprise souleva cette foule. Magnifique, drapé de rouge, un puissant sein nu dehors, coiffé d’un bonnet phrygien, chaussé de sandales, sceptre-casse-tête sur une épaule, un homme à l’allure de dieu se présenta sous un parapluie, entre deux amazones fulgurantes et suivi de l’appareil royal. C’était Agboli-Agbo, l’oncle de