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TERRE D’ÉBÈNE

L’employé blanc du trafic tourna le dos, haussant les épaules.

Il est donc des gens qui voyagent avec quarante caisses ? S’il en est et qu’ils ne soient pas décorés de l’ordre de la voie ferrée, le ministre des Travaux Publics est un grand négligent !

L’employé avait dit vrai.

Les voyageurs arrivaient avec tant de colis que tous avaient l’air d’épiciers en gros qui déménageaient !

Viandes, légumes, poissons, fruits, tout ce que l’industrie moderne a su mettre en boîte. Lingerie, literie, bois de lit, cela suivait depuis la France pour aller se faire manger dans un poste de brousse, les victuailles par les broussards, le mobilier par les termites.

Un beau noir me précédait au guichet. Un électeur de Blaise. Ainsi ses frères appellent-ils M. Diagne. L’électeur était coiffé d’un chapeau dit melon et qui avait dû servir une quinzaine d’années, comme objet d’expérience, à ces camelots de rues barrées, vendeurs de savons qui détachent !

— Donne-moi un billet, dit-il au guichetier.

— Pour où ?

— Tiens ! donne-m’en pour cinquante francs.

La traite des arachides terminée, les Sénégalais ont un peu d’argent ; alors ils vont se promener.