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TERRE D’ÉBÈNE

Six jours avaient passé. Le voyage noir commençait. J’allais prendre mon pied la route, comme disent les nègres, ce qui signifie partir. Ce serait le Sénégal, la Guinée, le Soudan, la Haute-Volta, la Côte d’Ivoire, le Togo, le Dahomey, le Gabon, le Congo. Après Dakar, Tombouctou ! Je cherche à vous lancer des noms connus : Ouagadougou ! La brousse ! la forêt, les coupeurs de bois, les chercheurs d’or, les poseurs de rails. Ah ! les poseurs de rails ! Les grands fleuves que l’on ne finit plus de remonter, les maisons de boue qui sont bien les plus vastes fabriques de chaleur en conserve signalées jusqu’à cette date. Ce serait de l’auto, du chaland, du chemin de fer, du cheval, du chameau, de la pirogue, du Decauville, du tipoye. L’empire noir de la République. Ses sujets, ses maîtres. Le pays inconnu des habillés de blanc et des humains tout nus. Ce serait…

Soudain quelqu’un me demanda :

— Avez-vous de la vaisselle ? du mobilier ? Combien de caisses ?

J’étais sur le quai de la gare, à Dakar.

— Combien de caisses ? Dix ? Vingt ? Trente ? Quarante ? Je dois le savoir pour le nombre de fourgons.

— Moi, dis-je, j’ai une valise.

— Une valise ? Où allez-vous ?

— Partout !