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TERRE D’ÉBÈNE

Rien que des nègres et que des négresses, une pierre sur la tête et une latte d’arlequin à la main !

Au Soudan, en Haute-Volta, à la Côte d’Ivoire, dans toute la pléiade, on compte plus de cinquante mille kilomètres de routes. Tous les matériaux qui ont servi à les faire ont été portés sur la tête du nègre !


Qu’est-ce que le nègre ? Le nègre n’est pas un Turc, comme l’on dit. Il n’est pas fort. Le noir, en teinture, n’est pas un brevet de solidité. Parfois, dans les camps, les prestataires meurent comme s’il passait une épidémie. À ce propos, une phrase grandiose ; elle est extraite d’un rapport officiel. On y lit : « La fragilité inconcevable des indigènes… » Il faut les voir quand il pleut. Ils marchent ratatinés, comme sous le coup d’une violente colique, à petits pas sautillants, les deux bras croisés sur leur poitrine, main droite tenant l’épaule gauche, main gauche tenant l’épaule droite. Et les soirs ? Il ne fait pas chaud toujours ; ils toussent comme dans un sanatorium. Ceux qui possèdent une loque la plaquent soigneusement sur leur dos. Cela ne les empêche pas de grelotter, en compagnie des moins riches, autour de trois tisons de bois où quelques-uns soufflent jusqu’à leur dernier souffle.

On agit comme s’ils étaient des bœufs. Tout