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TERRE D’ÉBÈNE

visite. « Quel est ton nom ? » demandèrent-ils à mon supérieur, le père Hacquart.

« — Abdallah !

« — Et celui de ton camarade ?

« — Yacouba !

« Mon père, lui dis-je après coup, vous auriez pu me choisir un nom moins youpin !

« Il avait été pris de court. Je restai Yacouba.

— Vous avez fait colonne avec l’armée ?

— Ah ! oui ! en 1900, avec le lieutenant Pichon, à Araouan.

— Puis à Taoudéni, puis dans le Gourma, puis…

— J’ai connu tous ces messieurs les officiers. Savez-vous comment Gouraud attrapa ses vingt premiers jours d’arrêt ? Une bande de Touareg nous ennuyait dans la forêt de Kabara. Il y partit, et reçut un bon coup, même que je n’avais ni teinture d’iode ni pansement pour le soigner. Mais la région fut nettoyée, la route libre jusqu’au Niger. Quelques jours après une dépêche arriva de Paris. Je m’apprêtais à déboucher ma dernière bouteille pour fêter son troisième galon. C’était vingt jours d’arrêt que lui envoyait le ministère ! On ne nous gâtait pas, en ce moment.

— Et comment n’êtes-vous plus Père Blanc ?

Il me regarda avec deux yeux remplis d’un trouble ancien.