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PÊCHEURS DE PERLES

l’empêche pas d’en changer. Un jour son poil est gris et taillé court ; un an plus tard, il est noir et sans fin comme au menton d’un mandarin. Des personnes affirment, en secret, qu’on le rencontre aussi tout rasé.

Dès qu’il quitte la France, il coiffe le fez. On le prend pour un Égyptien, ce qui ne lui plaît pas, les Égyptiens, à son avis, parlant un mauvais arabe tandis que lui en parle un fameux. L’un de ses défauts est de nier la vertu du vin : il ne veut voir que des carafes devant lui. Est-ce par fanatisme musulman ? S’il n’est pas musulman, je ne comprends rien, en effet, à sa conduite. Il fait la première prière à 3 heures de l’après-midi : l’Asser ; la deuxième à 6 heures : Moghreb ; la troisième, à 7 h. 20 : Icha ; la quatrième, entre 3 et 4 heures du matin : Fagr ; la cinquième deux minutes après midi : Dhohr.

Grâce à la prière Fagr, je fis sa connaissance. Nous occupions tous les deux une même cabine de paquebot. Au milieu de la nuit, un fantôme hanta le lieu de repos, se livrant à des génuflexions, se palpant les yeux, se chatouillant les oreilles ; puis le grand corps s’affaissa et, pendant que du front il frappait le parquet, une croupe, menaçante, s’arrondissait. Tapi et terrifié dans ma couchette, je criai : « Qui va là ? ». C’était Ché-