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LES COMITADJIS

a été pendu, mon grand-père a été pendu. » C’est ce que j’appelle les souvenirs du passé. Quant aux Macédoniens de race bulgare, insoumis à la victoire serbe, justement c’est pour ne pas être pendus qu’ils ont transporté leur tente ici. Ce sont des circonstances capables, tout de même, de créer une atmosphère !

Aussi, est-elle ici palpable comme un objet.

Ces gens qui échangent des sourires, qui se repassent des confidences à l’oreille semblent en possession d’un secret qui fait d’eux, non des habitants d’une même petite ville, mais des complices d’une même conjuration. Le commerçant en est, le cafetier en est, le maître d’école en est, le cireur de bottes en est, le chien en est. Personne ne tiendrait ici qui n’en serait pas. Chez l’épicier, vous avez le sentiment que vous pouvez demander indifféremment un kilo de sucre candi ou une douzaine de balles de revolver. Le signe de la révolte est inscrit dans l’air comme, au-dessus des couvents, celui de la prière. Les moines se lèvent la nuit pour s’agenouiller et ces Macédoniens-là pour conspirer !

Nous voilà partis de la mairie à travers la ville. Nous promenons « notre » terrorisme dans les rues comme un homme, en rentrant chez lui, promène par ses escaliers son pyjama et ses pantou-