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LE CHEMIN DE BUENOS-AIRES

lèche, mais un café avec du lait. Et que faisaient-ils à ces terrasses ? La tête d’un Français qui reçoit sa feuille d’impôts.

— Souriez, leur disais-je.

Ils ne m’obéissaient pas. L’intonation du photographe me manquait, sans doute.

Quant aux femmes elles étaient surtout dans les maisons de leur mari ou de leurs père et mère. Tous ces hommes allaient sans femme, buvaient sans femme, mangeaient sans femme. Les mâles inondaient la ville.

J’étais dans le centre, mais où étaient mes hommes du milieu ?

J’ouvris mon carnet et je vis que je devais d’abord me rendre 445 Cerrito. J’avais un plan de Buenos-Aires. Il faudrait être un individu infiniment remarquable pour circuler sans plan dans Buenos-Aires. C’est un nid d’abeilles. C’est fait comme un radiateur d’automobile. Les alvéoles s’appellent cuadres. Cuadre veut dire carré. Ce sont des carrés parfaits de cent mètres de côté. Buenos-Aires est un interminable champ où l’on a planté des maisons, hectare par hectare. D’étroits sillons séparent chacun de ces hectares bâtis, ce sont les rues. Parcourir Buenos-Aires n’est pas marcher, c’est jouer aux dames avec ses pieds. On se croit un pion que l’on pousse à angles droits, sur un damier.