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LE CHEMIN DE BUENOS-AIRES

Le patron de Rosario avait écrit à Robert le Bleu, lui signalant un relâchement dans la conduite de sa « môme », de la « mollesse dans le travail », « un manque d’enthousiasme coupable ».

— C’était forcé, me dit Robert le Bleu. Une femme que l’on ne surveille pas de près, bat de l’aile. Depuis un mois je n’ai pu aller à Rosario. Ce fut une faute. J’ai trop compté sur mon influence. Le jouet ne marche plus. Je dois remonter la manivelle.

Il en profiterait aussi pour toucher ses jetons.

Quand « l’homme » est sur place, il passe tous les samedis à la « maison ». Sa femme lui remet ses jetons et, contre les jetons, le « patron » lui donne les pesos correspondants.

Et la femme ? que garde-t-elle ?

Cela dépend.

Rien, souvent. Nourrie, couchée, blanchie, elle abandonne son gain à son homme. Elle est jeune ! Elle agit sans calcul, elle se régale le cœur, comme m’a dit une fois Mademoiselle Mignon !

Le « doublard » de Robert le Bleu s’appelait Marcelle.

Justement Marcelle avait demandé trois cents pesos à son patron. Le patron les lui avait refusés. L’argent que tu gagnes est à ton homme, lui avait-il dit. C’est devant un pareil geste d’indépendance qu’il