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LE CHEMIN DE BUENOS-AIRES

dit Jeannot, j’ai pris ma première dans le refuge d’un tram. Elle était tellement sale et pauvre que je la faisais marcher devant. Elle a fait une bonne petite femme.

Ils travaillent surtout dans les malheureuses. La véritable fille de la rue est trop « vicieuse », elle ne se laisse pas cajoler. Le meilleur gibier est la mi-professionnelle, inoffensive, qui ne sait pas où aller coucher. Il y a les marcheurs, qui vont au marché, pour les petites bonnes. Boniment ! Une paire de bas de soie, un chapeau, deux rendez-vous. Elle est dans le filet. Il y a les chasseurs : Un homme est démonté (il n’a plus de femme), il cherche un dessous (une seconde femme), le succès de ce chercheur n’est pas foudroyant auprès des « mangeuses » de café crème, il a recours à un « chasseur » qui plus frais, plus fringant, avec de belles dents, lui rabat la caille.

Il y a les placeurs. Ceux-là font un métier officiel. Leur rôle est d’entretenir le feu sacré, sous l’œil de la loi, dans les « maisons » de France. Ils n’ont pas le droit de s’occuper de l’exportation. Ils le prennent. En permanence dans les bars spéciaux, ils sont au courant de toutes les affaires, de toutes les défaillances et de toutes les neuves misères du quartier. Dans les prix raisonnables de trois mille francs, ils vous livrent parfois un bon objet.