Page:Londres - Le Juif errant est arrivé, 1930.djvu/214

Cette page a été validée par deux contributeurs.
213
le juif errant est arrivé

cents et vieillards sont penchés sur le même Talmud ou le même Zohar. Une ferveur identique anime celui qui est près de sa naissance et celui qui est près de sa mort. Les têtes sont jusqu’ici les plus sensationnelles de mon voyage. Celui-ci ressemble à un mouton mérinos ; ce chauve à un vieux condor. On croirait que l’un va bêler et l’autre battre des ailes. Et le beau-frère pousse une seconde porte. Au fond d’une grande pièce nue, un homme assez court, tassé, bien nourri, coiffé d’un bonnet de haute fourrure, les deux mains comme Napoléon, debout près d’une fenêtre donnant sur un tas de fumier, nous regarde venir la lippe aux lèvres.

C’est le zadick.

Sa barbe est blanche et son regard a la dureté du diamant. Un regard qui invite l’esprit du visiteur à faire un rétablissement.

Pas une chaise dans cette salle du trône. Sa table, son fauteuil, rien d’autre. Cette puissance ne veut rien devoir à l’extérieur.

Nous voilà en face de lui. Il interroge son beau-frère. Il me tend la main. Quant à Ben, il n’a droit qu’à un geste méprisant du petit doigt. Si je suis un chien, Ben est un animal pire : un Juif qui a coupé sa barbe n’est pas très loin du porc. Les politesses