Quand nous aurons brisé souvenirs et remords,
Nous les embaumerons comme autrefois nos morts.
Et nous irons, après, attendre dans l’ivresse,
L’enfant qui reviendra du parc à dos d’ânesse.
Lui montrant le cercueil, nous lui dirons : Voilà,
L’héritage était lourd, nous l’avons couché là.
Maintenant tu peux rire et chanter à ton aise,
Nous avons épuré ton air de son malaise.
Ma douce fille alors nous dira : « N’ayez peur,
« Je saurai conserver ma cicatrice au cœur.
« Je saurai mélanger, dans le vase que j’aime,
« L’éblouissante rose au triste chrysanthème.
« Même au fort du bonheur, je penserai, les soirs,
« Qu’il existe une croix qui me tend ses bras noirs.
« Je n’oublierai jamais, si bonne m’est la terre,
« Que, pour le passé mort, je dois être une serre.
« Je saurai m’arrêter au milieu d’un beau chant
« Pour songer que je fus bercé par du plain-chant.
« J’aurai soin de porter, piqué dans ma toilette,
« Un papillon de crêpe ainsi qu’une amulette.
« L’ombre de mon regret aura l’air en gaîté,
« Mon cœur sera d’automne et ma chanson d’été. »