chasser. Il convient donc d’observer des jeûnes.
Quand on est face à sa gamelle, il ne faut pas sauter dessus en affamé, il faut se mirer, dédaigneusement dans sa soupe ainsi que dans un miroir terni. Si l’officier passe et demande : « Pourquoi ne mangez-vous pas ? » se garder comme de la peste de répondre : « Je suis malade. » Si l’officier fait lui-même : « Vous êtes malade ? » repartir, sans se presser, tout en levant sur lui des yeux absents : « Oh ! non ! » Ne parler à personne. Quand on vous parle, ne pas dire : « Tu m’embêtes ! » Ne rien dire du tout, ne pas répondre. Maigrir, cela est primordial. Se traîner, même quand on est assis. Être toujours présent au travail, chaque jour, avec une bonne volonté accrue, chaque jour avec des forces qui vous quittent. Si le hasard miraculeux veut qu’un sergent vous dise : « Laisse ça, va à l’infirmerie » répondre : « Mais non, sergent, je peux encore piocher » et continuer de piocher. Enfin, le jour où le médecin dit : « On pourrait peut-être le proposer pour un retour en France », rester complètement indifférent. Le résultat que l’on attend de la nostalgie aiguë est à tous ces prix-là.