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CHEZ LES FOUS

Il doit louer les deux couchettes du wagon-lit.

Une seule suffirait pour la célébration de son sacrifice, mais il ne faudrait pas qu’au milieu de l’office le voyageur de la couchette du haut penchât la tête et dit : « Eh là ! l’homme ! Vous n’avez pas bientôt fini de faire griller des noisettes dans votre cageot du bas ? »

Car le profane qui sent la fumée d’opium s’écrie toujours :

— Cela sent la noisette par ici.

Cependant, l’opiomane est parfois forcé de voyager en commun. Au bout de vingt-quatre heures le cher homme devient martyr.

Il a bien des cachets qu’il acheta vides chez le pharmacien et qu’il bourra d’opium. C’est noirâtre. Ce n’est pas si bon que la fumée ; cela lui tient tout de même au corps quelques heures.

Mais les heures passent… et les cachets ne passent plus. L’homme entre en sueur, ses yeux pleurent, son nez coule. Son compagnon a le temps de prendre la victime sous le bras et de lui tenir le front à la portière, mais tout juste. Mistral, mousson, bora, tous les vents du grand large le secouent intérieurement du nombril au cerveau. Il n’en peut plus. Il se sent partir. Il allait à Madrid, il s’ar-