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sur la pente, cette nouvelle page serait tournée et une autre commencerait. Ainsi va de la vie, page après page, le livre sans aucune trêve, quand on a pour soi la jeunesse.

Nous engageâmes une dernière partie dans laquelle le noir ne fut pas perdant. La victime était un vagabond maigre, à l’air dyspeptique, celui qui avait ri le moins de nous tous. Nous lui annonçâmes que nous étions saturés d’eau, ce qui était la pure vérité. La promesse des trésors de l’Inde, pas plus que la pression d’une pompe pneumatique, n’auraient pu introduire une autre goutte dans mon estomac.

Le négro prit un air désappointé, puis, se mettant à la hauteur de la circonstance, il réclama à boire. Réellement il avait soif ! Le vagabond mélancolique ne cessa, pendant une demi-heure, de grimper le raidillon, et le noir, toujours altéré, redemandait de l’eau. Il en avala plus à lui seul que tout le reste de la bande.

Le crépuscule fit place à la nuit, les étoiles apparurent au ciel, et il buvait encore. Si le sifflet du train de marchandises ne s’était pas fait entendre, sans doute serait-il toujours là, se gorgeant de liquide et savourant