Page:London - Les Vagabonds du rail, 1974.djvu/73

Cette page n’a pas encore été corrigée

le siège d’une des voitures, la tête penchée en avant, son menton touchant ses genoux qu’elle entourait de ses bras. Elle ne paraissait pas heureuse. On eût dit qu’elle ne s’intéressait à rien, ce en quoi je me trompais, car un peu plus tard j’appris qu’elle se passionnait tout au moins pour quelque chose. Toute la souffrance humaine se lisait sur son visage, et, en plus, une expression tragique indiquait son impossibilité à soutenir plus longtemps la lutte. La mesure était comble, voilà ce que semblait dire son attitude ; mais, ici encore, je me leurrais.

Je m’étendis dans l’herbe au bord du talus et engageai la conversation avec les hommes. Nous appartenions à la même famille, nous étions des frères, moi le vagabond, et eux les romanichels. Nous connaissions suffisamment notre argot respectif pour nous comprendre. Deux d’entre eux venaient de traverser le fleuve et étaient allés à Harrisbourg pour exercer leur métier de « raccommodeurs de parapluies » ; mais on me cacha la véritable occupation qui se dissimulait derrière cette honorable profession, et il eût été malséant de s’en enquérir.

La journée était superbe, sans un souffle