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l’extrême ressource du vagabond. On peut toujours compter sur eux : jamais ils ne repoussent le mendiant. Maintes fois, à travers les États-Unis, on m’a refusé du pain dans les maisons cossues sur la colline, mais toujours on m’en a offert, près du ruisseau ou du marécage, dans la petite cabane aux carreaux cassés remplacés par des chiffons, où l’on aperçoit la mère au visage fatigué et ridé par le labeur. Ô ! vous qui prêchez la charité ! prenez exemple sur les pauvres, car seuls ils savent pratiquer cette vertu. Ils ne donnent pas leur superflu, car ils n’en possèdent point. Ils se privent parfois du nécessaire. Un os jeté au chien ne représente pas un acte charitable. La charité, c’est l’os partagé avec le chien lorsqu’on est aussi affamé que lui.

Ce même soir, je fus chassé d’une villa dont les fenêtres de la salle à manger donnaient sur la véranda. J’aperçus un homme dévorant un pâté, un énorme pâté de viande. Je me tenais debout devant la porte ouverte et, tandis qu’il me parlait, il continuait de manger. Il éclatait de prospérité et semblait éprouver une certaine rancœur contre ses frères moins fortunés.