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demi-heure délectable. Tout à coup une bousculade se produisit, Punch fut balayé de côté comme un fétu de paille sur le passage d’un cyclone, et le molosse fondit sur les restes. En dépit de sa grosse panse, il devait jeûner souvent, car dans la fraction de seconde qui précéda le coup de pied que je lui lançai dans les côtes, il avait complètement englouti le contenu du plat et, d’un dernier coup de langue, nettoyé jusqu’aux traces de graisse.

Je me comportai à la table de ces deux vieilles demoiselles de Harrisbourg tout comme le terre-neuve devant l’assiette de mon chien Punch. Je ne brisais rien, mais je faisais tout disparaître, œufs, rôties et café. La servante en apportait sans discontinuer. Le café était délicieux, mais pourquoi le servir dans de si petites tasses ?

Les deux braves demoiselles, au teint blanc et rose et aux boucles grises, n’avaient jamais contemplé le visage rayonnant de l’aventure. Ainsi que s’exprimerait un vagabond, toute leur vie elles avaient « travaillé dans la même équipe ». Parmi les doux parfums de leur existence calme et mesquine, j’apportais le grand souffle du monde, chargé