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l’effort suivi, il savoure la joie de se laisser entraîner aux caprices du hasard.

Lorsqu’il m’arrive parfois d’évoquer mon existence de nomade, je reste confondu devant la rapide succession des images qui traversent ma mémoire comme des éclairs. Peu importe l’époque que je revois en imagination : pas un jour ne ressemble aux autres, chacun déroule son propre film cinématographique.

Ainsi, je me souviens d’un matin ensoleillé à Harrisbourg, en Pensylvanie ; aussitôt s’offre à mon esprit l’heureux début de cette journée, un « gueuleton assis » en compagnie de deux vieilles demoiselles, non pas dans la cuisine, mais dans la salle à manger, et elles sont assises près de moi à table.

Elles me servirent des œufs dans des coquetiers. C’était la première fois que je voyais ou que j’entendais parler de ces objets-là. Tout d’abord je fus quelque peu gauche, je l’avoue, mais la faim me fit perdre toute timidité. Je m’accommodai du coquetier et je vins à bout des œufs avec une maîtrise qui fit sursauter les deux vieilles filles.

Quant à elles, on eût dit un couple de canaris, à leur façon de manger leur œuf et de