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est arrivé cet après-midi et il s’est fait beaucoup de mal, le pauvre chéri.

Elle le câlina de la voix, avec une tendresse ineffable après laquelle je soupirais. Je regardai le jeune homme assis de l’autre côté de la table, maigre et pâle, la tête enveloppée de bandages. Il ne bougeait pas, mais ses yeux brillants, à la lueur de la lampe, me fixaient d’un regard étonné.

— Tout comme mon pauvre père, dis-je. Lui aussi tombait du haut mal. Une sorte de vertige qui intriguait les médecins. Jamais ils ne purent trouver la cause de cette maladie.

— Il est mort ? demanda-t-elle d’une voix affectueuse, en plaçant devant moi une demi-douzaine d’œufs à la coque.

— Il est mort voilà deux semaines. J’étais avec lui quand le malheur arriva. Nous traversions la rue ensemble. Il s’affaissa subitement et ne revint plus à lui. On le transporta dans une pharmacie. C’est là qu’il rendit le dernier soupir.

Là-dessus je racontai la vie lamentable de mon père. Après la mort de ma mère, lui et moi nous avions quitté le ranch pour aller à San Francisco ; sa pension (c’était un ancien soldat), et le peu d’argent qu’il possédait