Page:London - Les Vagabonds du rail, 1974.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée

tabac. Nous prêchions aussi d’exemple. Dans le cœur de chaque détenu nous inculquions l’ambition de devenir nos égaux et de se faire de la gratte. N’étions-nous pas des sauveurs de la société ?

Prenons un affamé qui n’avait pas de tabac. Peut-être avais-je affaire à un vicieux qui avait tout fumé à lui seul. Très bien. Il possédait une paire de bretelles. Je l’échangeais contre une demi-douzaine de rations de pain – ou une douzaine si cet article me paraissait bon. Quant à moi, je n’ai jamais porté de bretelles, mais cela importait peu. À l’autre bout je connaissais un type qui purgeait dix années pour assassinat. Celui-ci se servait de bretelles et en réclamait une paire. Je les abandonnerais contre une certaine quantité de viande. De la viande, voilà ce que je cherchais ! Peut-être encore avait-il un roman broché en lambeaux, un vrai trésor ici. Je le lirais et ensuite je l’échangerais avec le boulanger contre du biscuit, ou avec les cuisiniers contre de la viande et des légumes, ou avec les pompiers contre du bon café, ou avec quelqu’un d’autre contre le journal qui, par hasard, pénétrait dans la prison, Dieu sait comment !