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LES TEMPS MAUDITS

Plutôt que d’encourir les reproches du margis, il eût volontiers mené à leur perte une douzaine de Chinagos innocents.

Quant à Ah-Cho, lorsque le gendarme lui eut donné sur la tête un coup de manche de fouet en lui ordonnant à haute voix de se taire, il ne lui restait rien à faire que d’obéir. La longue course se poursuivit en silence. Ah-Cho réfléchissait aux étranges façons de ces diables étrangers et les trouvait inexplicables. Le tour qu’ils lui jouaient allait de pair avec tout le reste. Après avoir reconnu coupables cinq innocents, ils voulaient couper le cou à un homme qu’eux-mêmes, dans leur béate ignorance, avaient jugé passible de vingt ans de bagne seulement. Et il n’y pouvait rien, que rester assis et se résigner à la mesure dictée par ces maîtres de la vie.

Il éprouva un moment de panique et sentit la sueur se refroidir sur son corps, puis essaya de se résigner à son destin en répétant certains passages du « Yin Chih Wen » (Le Traité de la voie tranquille) ; mais, au lieu de se les rappeler, il continuait à songer à son jardinet de méditation et de repos. Ennuyé, il s’abandonna à cette rêverie et crut entendre le tintement des harpes éoliennes dans des