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LE RENÉGAT

— Je déclare que j’ai fait de mon mieux, dit-elle en sanglotant.

Il sortit de la maison et descendit la rue. Un pâle contentement s’esquissa sur son visage à la vue de l’arbre solitaire. Bibi ne va plus se la fouler, se dit-il à mi-voix. Il jeta vers le ciel un regard ardent, mais les rayons du soleil l’éblouirent et l’aveuglèrent.

C’était une longue marche qu’il entreprenait, mais il n’allait pas vite. Il passa devant la filature. Le bourdonnement étouffé de la salle des métiers lui parvint aux oreilles et le fit sourire, d’un sourire doux et paisible. Il n’éprouvait nulle haine, même contre le tapage criard des machines. Son esprit n’abritait aucune rancœur, rien qu’un désir immodéré de repos.

Les maisons et les usines devenaient plus rares et les espaces découverts se multipliaient à mesure qu’il approchait de la campagne. Enfin, laissant la ville derrière lui, il s’engagea dans un sentier de verdure ; il avait moins l’air d’un homme que d’une caricature d’humanité : morceau de vie tordu, rabougri, innommable, il se traînait comme un singe maladif, les bras pendants, les épaules rentrées