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LA FORCE DES FORTS

— Oui, à condition d’aller lui-même habiter un autre arbre.

— Nous ne faisons plus de choses pareilles, observa Froussard-de-nuit.

— Parce que j’ai enseigné de meilleures façons à vos pères.

Barbe-en-long allongea sa patte velue vers le rôti d’ours et saisit une poignée de graisse, qu’il suça d’un air absorbé. Puis, s’essuyant de nouveau les mains sur ses flancs nus, il continua :

— Ce que je vous raconte se passait voilà longtemps, alors que nous ne connaissions pas encore les bonnes manières.

— Vous deviez être rudement sots pour ne pas les connaître, remarqua Courre-daim, et Poil-de-carotte l’approuva d’un grognement.

— Nous l’étions, mais nous le devînmes plus encore, comme vous allez le voir. Néanmoins nous apprîmes à mieux vivre, et voici comment :

« Nous autres Mangeurs-de-poissons n’avions pas encore appris à mettre nos forces en commun pour devenir forts individuellement. Mais les Mangeurs-de-viande, qui habitaient la Grande Vallée de l’autre côté de