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LE RÊVE DE DEBS

— On ne m’a rien apporté, Monsieur, continua Brown en guise d’explication ; mais je l’interrompis.

— Le journal ?

— Oui, monsieur, c’est la seule chose qui ait été distribuée, et pour la dernière fois. Demain, les journaux ne paraîtront pas : c’est annoncé dans le journal. Dois-je envoyer chercher une boîte de lait condensé ?

Je fis un signe négatif, acceptai le café noir et dépliai la feuille. Les en-têtes expliquaient toute la situation, et exagéraient même, car les articles débordaient d’un pessimisme ridicule. Une grève générale, disaient-ils, venait d’être déclarée dans tous les États-Unis ; et le journal exprimait les craintes les plus alarmantes à propos de l’approvisionnement des grandes villes.

Je le parcourus à la hâte, esquivant les détails et me souvenant des troubles travaillistes du passé. Depuis une génération, la grève générale était le dada des travailleurs organisés : songe issu du cerveau de Debs, un des grands chefs de la classe ouvrière une trentaine d’années auparavant.

Je me rappelais même avoir pondu pour une revue, vers la fin de mes études, un article