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LES TEMPS MAUDITS

Bill. C’étaient les propres termes du rupin qui lui avait apporté une consommation et tapé sur l’épaule après l’assaut. « La jeunesse sait se faire servir ! » Le rupin avait raison et, en cette lointaine soirée, lui-même représentait la Jeunesse.

Ce soir, la Jeunesse était assise dans le coin opposé. Quant à lui, il venait de se battre pendant plus d’une heure, et maintenant il se sentait réellement vieux. S’il s’était battu comme Sandel, il n’aurait pas duré un quart d’heure. L’ennui, c’est qu’il ne récupérait pas ses forces. Ces vaisseaux en saillie et ce cœur surmené ne lui permettaient pas de retrouver assez d’énergie dans les intervalles entre deux reprises.

D’ailleurs, dès le début, ses forces avaient été insuffisantes. Ses jambes s’alourdissaient sous lui et il commençait à y éprouver des crampes. Il n’aurait pas dû faire ces deux kilomètres à pied. Et puis ce bifteck dont il avait eu envie toute la matinée ! Une grande et terrible haine s’éleva dans son cœur contre ces bouchers qui lui avaient refusé tout crédit. C’était dur pour un vieil homme d’aller se battre sans avoir mangé à sa suffisance ! Un morceau de bifteck, c’est si peu de chose !