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UNE TRANCHE DE BIFTECK

on obtiendrait un fameux champion du monde des poids lourds. Mais voilà l’ennui : Sandel ne deviendrait jamais champion du monde : il lui manquait la prudence : il ne pouvait l’acquérir qu’au prix de sa jeunesse. Et quand il posséderait la prudence, il lui manquerait la jeunesse, dépensée à l’obtenir.

King profitait des moindres avantages. Il ne perdait jamais l’occasion d’un corps à corps, et dans ce cas, presque toujours, il enfonçait rudement son épaule dans les côtes de l’autre. Dans la philosophie professionnelle, un coup d’épaule vaut un coup de poing en ce qui concerne les dégâts, et vaut beaucoup mieux au point de vue de la dépense d’efforts. En outre, dans ces corps à corps, King reposait de tout son poids sur l’adversaire, et n’était pas pressé de se décoller. Cette situation nécessitait l’intervention de l’arbitre, qui venait les séparer : et immanquablement Sandel l’y aidait, n’ayant pas encore appris à se reposer. Il ne pouvait se retenir d’employer ses bras superbement agiles, ses muscles toujours prêts à se tordre ; et quand l’autre se précipitait dans un corps à corps, lui enfonçant son épaule dans les côtes et la tête reposant sous le bras gauche de