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À L’INSTAR DE ROBINSON

faim. Jamais, durant les huit années que je passai sur cet îlot, le temps ne fut aussi régulièrement clair et ensoleillé que je le trouvai, après ce massacre, pour faire sécher mes bandes de viande. Et je ne manquai pas d’y voir la une preuve renouvelée de la Providence de Dieu.

Plusieurs années devaient s’écouler, en effet, avant que ces animaux, effarés, ne revinssent visiter mon île. Mais je me gardai bien de dormir sur mes lauriers. Je me bâtis une hutte de pierres et, attenant à la hutte, un magasin pour recevoir ma viande salée. Je recouvris ma hutte avec la plus grande partie des peaux des phoques et en rendis ainsi la toiture imperméable. Chaque fois que la pluie battait mon toit, je songeais avec admiration que toutes ces peaux qui si humblement, servaient de protection à un pauvre homme, abandonné sur une île déserte, eussent représenté, au marché aux fourrures de Londres, la rançon d’un roi.

Une de mes premières préoccupations fut de m’ingénier à trouver un moyen quelconque qui me permit le calcul du temps. Sans quoi je perdrais bientôt la notion, non seulement des mois et des années, mais même des jours de la semaine et, ce qui était le plus fâcheux de tout, de celui qui était consacré au Seigneur.

Je m’efforçai donc de rappeler à mon esprit, avec le plus de précision possible, le nombre de jours qui s’étaient écoulés depuis le naufrage de la chaloupe, où le capitaine tenait, à sa façon, registre du temps. Quand je m’y fus bien retrouvé, j’établis, à l’aide de sept pieux placés près de ma hutte, mon calendrier hebdomadaire. Puis je fis, sur mon aviron, dorénavant, une encoche pour chaque semaine écoulée, et une autre pour les mois, en ayant bien soin d’ajouter à mon décompte des quatre semaines les jours supplémentaires.

Par ce procédé, je fus en mesure d’observer et sanctifier dignement le saint jour du Sabbat. Je composai et gravai sur mon aviron un petit Cantique approprié à ma situation, et que je ne manquais pas de chanter