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QUAND J’ÉTAIS RAGNAR LODBROG

tarda pas à surgir entre les deux hommes, sur le mérite réciproque des combattants des deux nations, et soudain Tostig Lodbrog, près de qui je me tenais debout avec le crâne de Guthlaf, qui puait et fumait, se prit à insulter et à mépriser injurieusement les femmes danoises.

Alors, me souvenant de ma mère danoise, je vis rouge. Je soulevai en l’air le crâne de Guthlaf et en assénai un coup violent sur la tête de Tostig Lodbrog, qui fut inondé, ébouillanté et aveuglé par le vin chaud.

Bien plus, tandis que, s’étant levé, il chancelait en battant l’air de ses grands bras, afin de me trouver et m’écraser, je sortis la petite dague que je portais. À trois reprises je le frappai, au ventre, à la cuisse et aux fesses, car je n’étais pas assez grand pour atteindre plus haut.

Ce que voyant, Agard mit son épée au clair, et ses hommes l’imitèrent, tandis qu’il criait :

— Un ourson ! Un ourson ! Par Odin, laissez l’ourson se battre !

Et, sous le toit tumultueux de Brunanbuhr, on vit le petit échanson de race danoise entamer une bataille en règle contre l’énorme Tostig Lodbrog, qui titubait sans pouvoir l’atteindre.

Il réussit enfin à m’empoigner, et me lança à l’autre bout de la table, parmi les cruches et les coupes, en hurlant :

— Sortez-le d’ici ! Qu’on le donne à manger aux chiens !

Mais Agard intervint et, frappant sur l’épaule de Lodbrog, me demanda à lui comme cadeau d’amitié.

Lorsque la mer fut dégelée et que les navires purent sortir des fjords, je partis donc sur la nef d’Agard, qui m’institua son échanson et son porte-épée, et qui me nomma Ragnar Lodbrog.

Nous fîmes voiles vers le sud et arrivâmes au pays d’Agard, qui était voisin de celui des Frisons. C’était