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SEIGNEUR ! UN PAUVRE MATELOT…

C’étaient de hardis pillards montés, qui parfois traversaient le Yalou sur leurs chevaux rapides, en masses compactes, pour s’abattre comme des sauterelles sur le territoire coréen. Le bruit courait qu’ils s’adonnaient au cannibalisme. Toujours est-il, comme je l’appris par ma propre expérience, qu’ils étaient des combattants redoutables, et qu’il n’était point commode d’en venir à bout.

L’année qui s’écoula fut fortement tourmentée. Tandis qu’à Keijo, Yunsan et Lady Om achevaient la perte de Chong-Mong-ju, je me taillai, dans mon gouvernement, une glorieuse renommée. C’était toujours Hendrik Hamel qui, dans mon ombre, me poussait et dirigeait. Mais, pour tous, j’étais la tête habile qui commandait et agissait.

En mon nom, Hendrik Hamel enseigna à mes troupes la tactique et l’exercice européens, et les conduisit se mesurer avec les Têtes-Rouges. Ce fut une lutte magnifique, qui dura une année entière. Mais, au terme de l’an, la frontière nord de la Corée était en paix, et sur la rive coréenne ne se trouvait plus une seule Tête-Rouge, sauf les morts laissés par l’ennemi.

J’ignore si cette invasion de Têtes-Rouges est rapportée dans les histoires d’Occident. J’ignore également si l’on y fait mention de celle qui, durant la génération précédente, fut conduite en Corée par Hideyoshi, alors Soghu du Japon. Cette invasion pénétra jusqu’au sud de la Corée, et Hideyoshi expédia au Japon un millier de barils, remplis d’oreilles et de nez, baignant dans de la saumure, qui provenaient des Coréens tués sur les champs de bataille. J’en ai causé souvent avec maints vieillards des deux sexes, témoins oculaires de ces combats, et qui avaient échappé à la marinade. Si ces deux grandes invasions, japonaise et des Têtes-Rouges, sont consignées dans les livres d’histoire, vous saurez exactement à quelle époque Adam Strang a vécu.

Mais revenons à Keijo et a Lady Om.