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LE SUPPLICE DE LA SOIF

les fameux scalps, qui pendaient à sa ceinture, et me les attacha autour de la taille.

Je protestai :

— Mais tu n’es pas encore tué, Laban !

— Je m’en flatte ! répondit-il en badinant. Je viens seulement de me mettre en ordre avec Dieu. Porter des scalps est une vanité toute païenne.

Il demeura encore un instant près de moi, puis tourna brusquement ses talons, afin de rejoindre les autres hommes de la caravane. Une dernière fois encore, il détourna la tête et me cria :

— Allons, au revoir, Jesse ! Au revoir !

Je me demandais pourquoi tant de cérémonie dans ces adieux, lorsqu’un blanc entra, sur son cheval, dans notre enceinte. Il disait que le major Higbee l’avait envoyé vers nous, pour nous recommander de nous hâter, parce que les Indiens pouvaient, d’une seconde à l’autre, commencer leur attaque.

Notre caravane s’ébranla, chargée de tous les paquets qu’elle pouvait emporter. Nous abandonnions derrière nous tous nos grands chariots, pour suivre les deux qui avaient été amenés par Lee. Femmes et enfants les talonnaient de près. Quand nous fûmes à deux cents yards en avant, nos hommes, à leur tour, se mirent en marche.

À droite et à gauche, se tenait la milice des Mormons. Appuyés sur leurs fusils, les soldats, debout, formaient une longue double ligne, écartés les uns des autres de six pieds environ. Tandis que tous défilions devant eux, je ne pus m’empêcher de remarquer la gravité sombre qui était empreinte sur leur figures. Ils étaient lugubres comme des croque-morts. Les femmes l’observèrent aussi, et quelques-unes se mirent à pleurer.

Je marchais dernière ma mère, qui avait feint de ne pas voir mes scalps. Derrière moi venaient les trois sœurs Demdike, deux d’entre elles soutenant leur vieille mère. J’entendis, devant nous, Lee qui criait sans cesse, aux deux hommes qui conduisaient les deux chariots, de ne