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LE SUPPLICE DE LA SOIF

cer à nous procurer de l’eau, on se reprenait à espérer. Le point noir était nos munitions. Une révision, faite par mon père dans tous les chariots, aboutit à un total de cinq livres de poudre. Il n’y en avait guère plus dans les poires à poudre des hommes.

Pensant que l’attaque ennemie allait reprendre, comme la veille, avec le soleil couchant, je me faufilai dans la tranchée, sous les chariots, près de Laban, que j’y rencontrai.

J’avais d’abord hésité à me faire voir de lui, craignant qu’en me découvrant là, il ne m’ordonnât de retourner sur mes pas. Il n’en fut rien. Il continua à observer avec méfiance, entre les roues des chariots, tout en mâchonnant son tabac. De temps à autre, il crachait toujours à la même place. Ce qui avait fini par creuser dans le sable un petit trou.

Je me hasardai à rompre le silence.

— Comment, dis-je, vont aujourd’hui les espiègleries ?

C’était une façon de me moquer de lui, car toujours il m’abordait par cette même phrase.

Il ne broncha pas et répondit :

— À merveille, jeune homme ! Et mieux que jamais je me porte, maintenant que j’ai pu recommencer à chiquer. Jesse, imagine-toi, j’avais la bouche tellement sèche, que depuis le lever du soleil j’avais dû déposer ma chique. Grâce à toi, qui nous as apporté de l’eau…

Un homme, à ce moment, montra sa tête et ses épaules, par-dessus la petite colline du nord-est, qui était occupée par les blancs.

Laban pointa vers lui son fusil et le tint couché en joue, pendant une bonne minute. Puis il laissa retomber son arme.

— Quatre cents yards ! dit-il. Il vaut mieux ne pas risquer le coup ; Il se peut que je l’atteigne. Mais je peux aussi le rater. Ton père, petit, tient à la poudre.

Il y eut un silence. Puis, avec un aplomb extraordi-