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— Taisez-vous, ajouta Marie avec tout le poids de son indignation. Vous êtes terriblement grossier, Bert Wanhope, et je ne veux plus rien avoir à faire avec vous… là !

Elle le repoussa d’entre ses bras, mais seulement pour l’y recevoir à résipiscence quelques secondes après.

— Restons ensemble tous les quatre ! proposa l’insupportable Bert. La nuit ne fait que commencer. Allons faire la noce, au café Pabst d’abord, ensuite ailleurs. Qu’en dis-tu, Bill, et vous, Saxonne ? Marie, elle, ne demande pas mieux.

Saxonne ne répondit pas, se demandant avec appréhension ce qu’allait dire cet homme assis près d’elle et qu’elle connaissait depuis si peu de temps.

— Rien de fait ! dit-il lentement. J’ai une rude journée de travail pour demain, et je crois qu’il en est de même pour ces demoiselles.

Saxonne lui pardonna d’avoir chanté faux. C’était bien le genre d’homme dont elle avait toujours soupçonné l’existence et dont elle espérait la venue. Elle avait maintenant vingt-deux ans, et dès seize ans elle avait reçu sa première demande en mariage : la dernière lui avait été faite, le mois précédent, par le contremaître de la blanchisserie, un bon et brave homme, mais d’âge presque mûr ; tandis que son voisin actuel était un homme bon et brave, mais fort et jeune par-dessus le marché. Elle-même était trop jeune pour ne pas désirer la jeunesse. Avec le contremaître, elle se serait reposée du repassage, mais sa vie aurait manqué de chaleur. Par contre, l’homme assis près d’elle… Elle se surprit sur le point de serrer involontairement cette main qui tenait la sienne.

— Non, Bert, ne nous agace pas, disait Marie. Il a raison. Nous avons besoin de dormir. Demain c’est jour d’amidonnage de fantaisie, toute une journée à rester debout.

Un frisson d’angoisse traversa Saxonne à l’idée qu’elle était sûrement l’aînée de Billy. Elle regarda, à la déro-