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La conversation dégénéra en un monologue de Marie, exclusivement consacré à Bert Wanhope.

— Toi et lui vous êtes bien ensemble, risqua Saxonne.

— Je l’épouserais demain ! lança Marie dans un élan d’enthousiasme.

Puis, subitement, son visage prit une expression froide et dure, presque pathétique, dans son incurable délaissement. Elle s’arrêta puis reprit avec une passion soudaine :

— Seulement, il ne me l’a jamais demandé. C’est… Prends garde à lui, Saxonne, s’il s’avise de venir faire le pantin autour de toi… C’est un vaurien !… Quand même, je l’épouserais demain… Il ne m’aura pas d’une autre manière.

Sa bouche s’ouvrit, mais au lieu de parler elle poussa un long soupir.

Un air de musique venant du pavillon de danse remit les jeunes filles sur pied.

— Nous pouvons faire un ou deux tours de valse avant de manger, proposa Marie. Puis ce sera l’après-midi et tous les types seront là. La plupart sont des grigous ; c’est pourquoi ils ne viennent pas de bonne heure, pour éviter d’offrir à dîner aux filles. Mais Bert n’est pas chiche de son argent, Billy non plus. Si nous pouvons faire la pige aux autres filles, ils nous mèneront au restaurant. Viens, dépêche-toi, Saxonne !

Les couples étaient encore rares sur le plancher du pavillon, et les deux jeunes filles essayèrent la première valse ensemble.

— Bert est là, murmura Saxonne au second tour.

— N’aie pas l’air de les voir, répondit Marie sur le même ton. Continuons comme si de rien n’était. Inutile de leur faire croire que nous leur courons après.

Cependant Saxonne remarqua que les joues de son amie se coloraient, et sentit sa respiration accélérée.

— As-tu vu l’autre type ? demanda Marie, faisant reculer sa partenaire en une longue glissade vers l’autre