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et détruit par morceaux, ou s’il a pu s’échapper en se dispersant. Mais le fait certain est que nous nous trouvions là en tête de la colonne et non au milieu, et qu’en ce moment nous étions balayés par une stridente averse de plomb.

Dès que la mort eut un peu éclairci le tassement, Garthwaite, qui ne m’avait pas lâché le bras, se précipita à la tête d’une poussée de survivants vers le large porche d’un bâtiment d’affaires. Nous fûmes pressés contre les portes par une masse de créature pantelantes, haletantes, et demeurâmes un certain temps dans cette horrible situation.

— J’ai fait du propre, se lamentait Garthwaite. Je vous ai entraînée dans une belle souricière. Dans la rue, nous conservions une chance de jeu, ici nous n’en avons aucune. Il ne nous reste plus qu’à crier : « Vive la Révolution[1] ! »

Alors commença ce à quoi nous nous attendions. Les Mercenaires tuaient sans faire quartier. L’effroyable pression, d’abord exercée sur nous, diminuait au fur et à mesure de la tuerie. Les morts et les mourants, en tombant, faisaient de la place. Garthwaite mit sa bouche contre mon oreille et me cria des mots que je ne pus saisir dans l’effrayant vacarme. Sans attendre davantage, il me saisit, me jeta à terre et me recouvrit du corps d’une femme agonisante. Puis, à force de serrer et de pousser, il se glissa contre

  1. En français dans le texte.