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Hartman se pencha sur elle. Quant à moi, je me sentais défaillir. Je devais voir bien des morts, ce jour-là, mais ce carnage en masse m’affecterait moins que ce premier cadavre abandonné là, à mes pieds, sur le pavé.

— Elle a reçu un coup de revolver dans la poitrine, déclara Hartman.

Elle serrait sous le bras, comme un enfant, un paquet d’imprimés. Même en mourant, elle n’avait pas voulu se séparer de ce qui avait causé sa mort. Car lorsque Hartman eut réussi à retirer le paquet, nous vîmes qu’il se composait de grandes feuilles imprimées, les proclamations des révolutionnaires.

— Une camarade ! m’écriai-je.

Hartman se contenta de maudire le Talon de Fer, et nous passâmes notre chemin. Nous fûmes plusieurs fois arrêtés par des agents ou des patrouilles, mais les mots de passe nous permirent d’avancer. Il ne tombait plus de bombes des fenêtres, les derniers passants semblaient s’être évanouis, et la tranquillité de notre voisinage immédiat était redevenue plus profonde que jamais. Cependant, le gigantesque chaudron continuait à bouillonner dans le lointain, le bruit de sourdes explosions nous arrivait de tous côtés, et des colonnes de fumée plus nombreuses dressaient plus haut leurs panaches sinistres.