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d’Église, c’est de maintenir l’ordre établi, et la société repose sur cette base-là.

— Mais ce n’est pas la doctrine du Christ, s’écria l’évêque.

— Aujourd’hui l’Église n’enseigne pas la doctrine du Christ, répondit Ernest. C’est pourquoi les ouvriers ne veulent rien avoir à faire avec elle. L’Église approuve la terrible brutalité, la sauvagerie avec laquelle le capitaliste traite les masses laborieuses.

— Elle ne l’approuve pas, objecta l’évêque.

— Elle ne proteste pas, répliqua Ernest, et dès lors elle approuve, car il ne faut pas oublier que l’Église est entretenue par la classe capitaliste.

— Je n’avais pas envisagé les choses sous ce jour-là, dit naïvement l’évêque. Vous devez vous tromper. Je sais qu’il y a beaucoup de tristesses et de vilenies en ce monde. Je sais que l’Église a perdu le… ce que vous appelez le prolétariat[1].

— Vous n’avez jamais eu le prolétariat, cria Ernest. Il a grandi en dehors de l’Église et sans elle.

— Je ne saisis pas, dit faiblement l’évêque.

— Je vais vous expliquer. Par suite de l’intro-

  1. Prolétariat, mot dérivé du latin Proletarii. Dans le système du Cens de Servus Tullius, c’était le nom donné à ceux qui ne rendaient d’autre service à l’État que d’élever des enfants (proles), autrement dit ceux qui n’avaient d’importance ni par la richesse, ni par la situation, ni par des capacités spéciales.