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avec une sécurité relative, et nous prendrions la direction de tout le mécanisme social.

Tel était notre plan ; chaque détail avait d’abord été élaboré en secret, puis, à mesure que l’époque approchait, communiqué à un nombre croissant de camarades. Cet élargissement progressif du complot en était le point dangereux : mais ce point ne fut même pas atteint. Grâce à son système d’espionnage, le Talon de Fer eut vent de la révolte projetée, et se prépara à nous infliger une nouvelle et sanglante leçon. Chicago fut le lieu choisi pour la démonstration, et elle fut exemplaire.

De toutes les villes, Chicago était la plus mûre pour la révolution[1] — Chicago jadis appelée la cité de sang, et qui allait de nouveau mériter ce surnom. Trop de grèves y avaient été écrasées à l’époque du capitalisme, et trop de têtes brisées dans la dernière, pour que les

  1. Chicago était le pandémonium industriel du XIXe siècle. Une curieuse anecdote nous vient de John Burns, grand chef travailliste anglais, qui fut un instant membre du Cabinet. Il visitait les États-Unis lorsque, à Chicago, un journaliste lui demanda ce qu’il pensait de cette ville : « Chicago ! répondit-il, c’est une édition de poche de l’enfer. » Quelques temps après, au moment où il prenait le bateau pour retourner en Angleterre, un autre reporter l’aborda pour lui demander s’il avait modifié son opinion de Chicago : « Oui, certes ! répondit John Burns. Mon opinion actuelle est que l’enfer est une édition de poche de Chicago. »