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ces esclaves du travail, le choix même de ce travail était dénié. On leur refusait également le droit de changer de résidence, et celui de porter ou de posséder des armes. Ils étaient serfs, non pas de la terre comme les fermiers, mais de la machine et du labeur. Quand le besoin d’eux se faisait sentir pour une tâche extraordinaire, comme la construction de grandes routes, lignes aériennes, canaux, tunnels, passages souterrains ou fortifications, des levées étaient opérées dans les ghettos des travailleurs, et par dizaines de milliers, de bonne volonté, ou de force, ils étaient transportés à pied d’œuvre. De véritables armées de serfs travaillent actuellement à la construction d’Ardis, parqués dans de misérables cabanes où la vie de famille est impossible, d’où la décence est bannie par une bestiale promiscuité. En vérité, elle est bien là dans les ghettos, la bête rugissante de l’Abîme tant redoutée des Oligarques : mais c’est eux-mêmes qui l’ont créée et l’entretiennent, c’est eux qui empêchent la disparition du singe et du tigre dans l’homme.

En ce moment même, le bruit court que de nouvelles levées sont projetées pour la construction d’Asgard, la cité-merveille qui doit dépasser toutes les splendeurs d’Ardis après l’achèvement de celle-ci[1]. C’est nous autres révolutionnaires

  1. Ardis fut achevée en 1942, et Asgard en 1984, La construction de cette dernière ville dura cinquante-deux ans, et employa une armée permanente d’un