Page:London - Le Talon de fer, trad. Postif.djvu/363

Cette page a été validée par deux contributeurs.

a pris naissance. Tout cela est connu, admis, entendu. Le point en question est que la force de l’Oligarchie gît actuellement dans sa conception satisfaite de sa propre rectitude[1].

À tout prendre, la force de la révolution aussi, durant ces vingt dernières et terribles années, a résidé exclusivement dans sa conscience d’être honnête. On ne peut expliquer autrement nos sacrifices, ni l’héroïsme de nos martyrs. C’est pour cette seule raison que l’âme d’un Mendenhall s’est enflammée pour la Cause et qu’il a écrit son admirable Chant du Cygne dans la nuit qui précéda son supplice. C’est pour cette seule raison qu’Hubert est mort dans les tortures, refusant jusqu’au bout de trahir ses camarades. C’est pour le même motif qu’Anna Roylston a refusé le bonheur de la maternité et que John Carlson est resté, sans rétribution, le fidèle

  1. De l’inconsistance et de l’incohérence morales du capitalisme, les Oligarques émergèrent avec une nouvelle éthique, cohérente et définie, tranchante et rigide comme l’acier, la plus absurde et la moins scientifique en même temps que la plus puissante qu’ait jamais possédée une classe de tyrans. Les Oligarques avaient foi en leur morale, malgré qu’elle fût démentie par la biologie et l’évolution ; et c’est grâce à cette foi que pendant trois siècles, ils ont pu contenir la vague puissante du progrès humain ; — exemple profond, terrible, déconcertant pour le moraliste métaphysicien, et qui au matérialiste doit inspirer beaucoup de doutes et de retours sur lui-même.