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L’évêque ne répondit pas.

— N’êtes-vous pas de mon avis ? insista Ernest.

Le prélat acquiesça de la tête.

— Alors nos deux propositions s’annulent réciproquement et nous nous retrouvons à notre point de départ. Recommençons. Les travailleurs des tramways fournissent la main-d’œuvre. Les actionnaires fournissent le capital. Par l’effort combiné du travail et du capital, de l’argent est gagné[1]. Ils se partagent ce gain. La part du capital s’appelle des dividendes. La part du travail s’appelle des salaires.

— Très bien, interrompit l’évêque. Et il n’y a pas de raison pour que ce partage ne s’opère pas à l’amiable.

— Vous avez déjà oublié nos conventions, répliqua Ernest. Nous sommes tombés d’accord que l’homme est égoïste, l’homme ordinaire, tel qu’il est. Vous vous lancez en l’air pour établir une distinction entre cet homme-là et les hommes tels qu’ils devraient être, mais qu’ils ne sont pas. Revenons sur terre ; le travailleur étant égoïste, veut avoir le plus possible dans le partage. Le capitaliste, étant égoïste, veut avoir tout ce qu’il peut prendre. Lorsqu’une chose existe en quantité limitée et que deux hommes veulent en avoir chacun le maximum, il y a conflit d’inté-

  1. En ce temps-là des groupes d’hommes de proie possédaient tous les moyens de transport et le public devait leur payer des taxes pour s’en servir.