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cations s’en suivirent. Ernest resta d’abord sceptique. Il m’examinait minutieusement et paraissait à demi convaincu, puis il hochait la tête et ne voulait plus croire. C’est seulement quand, redevenant l’Avis Everhard de jadis, je lui murmurai à l’oreille des secrets connus exclusivement d’elle et de lui, qu’il finit par m’accepter pour sa vraie femme.

Plus tard dans la journée, il me prit dans ses bras, affectant un grand embarras et s’accusant d’émotions polygames.

— Tu es ma chère Avis, dit-il, mais aussi quelqu’un d’autre. Étant deux femmes en une, tu constitues mon harem. En tout cas, nous sommes en sûreté pour le moment. Mais si jamais les États-Unis deviennent trop chauds pour nous je serai qualifié pour devenir citoyen en Turquie[1].

Je connus alors le parfait bonheur dans notre refuge. Nous consacrions de longues heures à des travaux sérieux, mais nous travaillions ensemble. Nous appartenions l’un à l’autre pour une période prolongée, et le temps nous paraissait précieux. Nous ne nous sentions pas isolés, car des camarades venaient et s’en allaient, apportant les échos souterrains d’un monde d’intrigues révolutionnaires et le récit des luttes engagées sur tout le front de bataille. La gaîté

  1. À cette époque la polygamie était encore pratiquée en Turquie.