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porte et entra. À ce moment, Biedenbach m’interpella du nom de Marie, et je me tournai pour lui répondre. Je regardai Ernest avec l’intérêt curieux qu’une jeune camarade manifesterait en voyant pour la première fois un héros si connu de la Révolution. Mais le regard d’Ernest se posa à peine sur moi, cherchant quelqu’un d’autre et faisant impatiemment le tour de la chambre. Je lui fus alors présentée sous le nom de Marie Holmes.

Pour compléter la déception, nous avions préparé un couvert de plus, et en nous mettant à table, nous laissâmes une chaise inoccupée. J’avais envie de crier de joie en remarquant l’anxiété croissante d’Ernest. Il ne put y tenir longtemps.

— Où est ma femme ? demanda-t-il brusquement.

— Elle dort encore, répondis-je.

C’était l’instant critique. Mais ma voix lui était étrangère, et il n’y reconnut rien de familier. Le repas continua. Je parlais beaucoup, et avec exaltation, comme aurait pu faire l’admiratrice d’un héros, et il était manifeste que mon héros, c’était lui. Mon admiration enthousiaste s’emporte rapidement au paroxysme, et avant qu’il puisse deviner mon intention, je lui jette les bras autour du cou et je l’embrasse sur les lèvres. Il m’écarte à bout de bras et promène de tous côtés des regards contrariés et perplexes… Les quatre hommes se mirent à rire aux éclats, et des expli-