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neurs se gorgeaient du trop-plein de richesses[1].

Nous appelions ces miséreux le peuple de l’abîme[2], et c’était en vue d’alléger leurs terribles souffrances que les socialistes avaient présenté ce projet de loi. Mais le Talon de Fer ne le trouvait pas à son goût. Il projetait, selon sa manière à lui, de procurer du travail à des millions d’êtres ; et, cette façon de voir n’étant

  1. Des conditions analogues prévalaient dans l’Inde au XIXe siècle sous la domination britannique. Les indigènes mouraient de faim par millions tandis que leurs maîtres les frustraient du fruit de leur travail et le dépensaient en cérémonies pompeuses et cortèges fétichistes. Nous ne pouvons guère nous empêcher, en ce siècle éclairé, de rougir de la conduite de nos ancêtres ; et nous devons nous contenter d’une consolation philosophique, en admettant que dans l’évolution sociale la phase capitaliste est à peu près au même niveau que l’âge simiesque dans l’évolution animale. L’humanité devait franchir ces étapes pour sortir de la vase des organismes inférieurs, et il lui était naturellement difficile de se débarrasser tout à fait de cette boue gluante.
  2. Cette expression est une trouvaille due au génie de H. G. Wells, qui vivait à la fin du XIXe siècle. C’était un clairvoyant en sociologie, un esprit sain et normal en même temps qu’un cœur chaudement humain. Plusieurs fragments de ses ouvrages sont venus jusqu’à nous, et deux de ses meilleures œuvres, Anticipations et Mankind in the Making, nous ont été conservées intactes. Avant les Oligarques et avant Everhard, Wells avait prévu la construction des cités merveilleuses dont il est question dans ses livres sous le nom de pleasure cities.