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Père fit une pause.

— Qu’a-t-il répondu ? demandai-je avec impatience.

— Rien. Que pouvait-il répondre ? C’est moi qui repris la parole : « J’espère que vous êtes heureux. — Il me regardait d’un air curieux et surpris. J’insistai : — Dites, êtes-vous heureux ?

« Soudain, il donna l’ordre au cocher de partir, et je l’entendis jurer profusément. Le bougre ne m’avait pas donné de pourboire, encore moins rendu ma maison et mes fonds. Tu vois, chérie, que la carrière de ton paternel comme coureur de rues est semée de désillusions. »

Et c’est ainsi que Père resta à notre quartier général de Pell Street pendant qu’Ernest et moi allions à Washington. Virtuellement, l’ancien ordre de chose était mort, et le coup de grâce allait venir plus vite que je ne l’imaginais. Contrairement à notre attente, aucune obstruction ne fut soulevée pour empêcher les élus socialistes de prendre possession de leurs sièges au Congrès. Tout semblait marcher sur des roulettes, et je riais d’Ernest qui voyait dans cette facilité même un sinistre présage.

Nous trouvâmes nos camarades socialistes pleins de confiance dans leurs forces et d’optimisme dans leurs projets. Quelques Grangers élus au Congrès avaient accru notre puissance et nous élaborâmes conjointement un programme détaillé de ce qu’il y avait à faire. Ernest participait loyalement et énergiquement à tous