Page:London - Le Talon de fer, trad. Postif.djvu/282

Cette page a été validée par deux contributeurs.


16. La fin


Quand le moment fut venu pour Ernest et moi de nous rendre à Washington, Père ne voulut pas nous y accompagner. Il s’était épris de la vie prolétarienne. Il considérait notre quartier misérable comme un vaste laboratoire sociologique, et semblait lancé dans une interminable orgie d’investigations. Il fraternisait avec les journaliers et était admis sur un pied d’intimité dans nombre de leurs familles. En outre, il s’occupait à des bricoles, et le travail était pour lui une distraction en même temps qu’une observation scientifique ; il y prenait plaisir, et rentrait les poches bourrées de notes, toujours prêt à raconter quelque aventure nouvelle. C’était le type parfait du savant.

Rien ne l’obligeait à travailler, dès lors qu’Ernest gagnait, avec ses traductions, de quoi nous entretenir tous les trois. Mais Père s’obstinait à la poursuite de son fantôme favori, qui devait être un Protée, à en juger par la variété de ses déguisements professionnels. Jamais je n’oublierai le soir où il nous apporta son éventaire de