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jour en jour : il fut entraîné vers l’économie politique et la science sociale, et comme il possédait un vif sentiment de justice, il ne tarda pas à se passionner pour le redressement des torts. Je notai avec gratitude ces indices d’un intérêt renaissant à la vie, sans me douter où la nôtre allait être menée. Lui, avec l’enthousiasme d’un adolescent, plongea tête baissée dans ses nouvelles recherches, sans s’inquiéter le moins du monde où elles aboutiraient.

Habitué de longue date au laboratoire, il fit de sa salle à manger un laboratoire social. Des gens de toutes sortes et de toutes conditions s’y trouvèrent réunis, savants, politiciens, banquiers, commerçants, professeurs, chefs travaillistes, socialistes et anarchistes. Il les poussait à discuter entre eux, puis analysait leurs idées sur la vie et sur la société.

Il avait fait la connaissance d’Ernest peu de temps avant « le soir des prédicants ». Après le départ des convives, il me raconta comment il l’avait rencontré. Un soir, dans une rue, il s’était arrêté pour écouter un homme qui, juché sur une caisse à savon, discourait devant un groupe d’ouvriers. C’était Ernest. Hautement prisé dans les conseils du parti socialiste, il était considéré comme un de ses chefs, et reconnu pour tel dans la philosophie du socialisme. Possédant le don de présenter en langage simple et clair les questions les plus abstraites, cet éducateur de naissance ne croyait pas déchoir en montant sur la